Même si 91 % des entreprises de l’Indice proposent des services de vulgarisation, ceux-ci se concentrent dans un petit nombre de pays, les principaux étant le Nigéria, le Ghana et le Mali. Ainsi, la majorité des pays de l’Indice (64 %) ne compte qu’une seule entreprise (Technisem), voire aucune, organisant des formations destinées aux petits exploitants. Bien que les entreprises s’intéressent aux jeunes exploitants, les programmes spécifiques concernant les femmes travaillant sur de petites exploitations et l’utilisation des technologies dans la vulgarisation présentent des lacunes.
Les services de vulgarisation sont essentiels pour aider les petits exploitants à cultiver de manière plus productive, plus durable et plus rentable. Signe encourageant, 21 entreprises (91 %) proposent une formation à l’agronomie, sous une forme ou une autre. Toutefois, seules trois d’entre elles (Seed Co, Syngenta et Technisem) organisent des formations dans plus d’un pays, ce qui s’explique par les disparités du secteur semencier de la région et les capacités limitées de nombreuses entreprises régionales. Dans neuf pays (39 %), aucune activité de vulgarisation n’a été signalée. Dans cinq autres, Technisem est la seule entreprise à proposer ce type de services qu’elle fournit d’ailleurs dans 13 pays au total, ce qui fait clairement d’elle un chef de file régional en la matière.
Dix entreprises proposent des activités dans leur seul pays d’origine, toutes indiquant qu’elles aident les petits exploitants en organisant des formations. Quatre entreprises ont leur siège au Nigéria où Value Seeds fait figure de leader régional grâce au travail de sa filiale Manoma Integrated Link qui propose des formations en agronomie dans l’État de Kaduna. Au Cameroun, Semagri emploie un réseau d’agents de vulgarisation qui ont organisé en 2017 plus de 30 journées « portes ouvertes » et ateliers de formation spécifiques ayant chacun attiré jusqu’à 100 petits exploitants. Il s’agissait de transmettre des compétences techniques ainsi que des connaissances sur les cultures (par exemple la saisonnalité de certaines espèces) et d’apprendre à reconnaître les maladies. Au Sénégal, Tropicasem déclare proposer une large gamme de services de vulgarisation, de manière indépendante ou en collaboration avec d’autres acteurs tels que des agences de développement économique et des ONG internationales, tandis que Nankosem, son partenaire du groupe Novalliance, organise des formations sur des champs semenciers afin de mobiliser les petits exploitants du Burkina Faso.
À l’exception de Technisem, les entreprises dont le siège ne se situe pas en Afrique subsaharienne concentrent les services de vulgarisation et les ressources sur des sites régionaux précis. Dans le cadre de son programme Advanced Maize Seed Adoption (GAMSAP), Corteva Agriscience mène des activités au Ghana, tout comme East-West Seed. À travers sa Fondation, Syngenta est leader au Mali et au Sénégal, tandis que l’entreprise néerlandaise Pop Vriend Seeds est présente au Nigéria où les sociétés signalant des activités de vulgarisation sont les plus nombreuses puisque leur nombre s’élève à huit. Notons que, dans ce domaine, l’entreprise française Technisem se démarque clairement par sa présence étendue. Il est intéressant de souligner que dans les pays où aucun service de vulgarisation n’est fourni, certaines entreprises signalent des activités de vente. Ces sociétés sont encouragées à envisager le déploiement de programmes de formation afin que les petits exploitants de la région bénéficient de ces services, puisqu’elles disposent de ressources relativement importantes par rapport à la plupart des entreprises semencières régionales. La planification du développement axé sur les petits exploitants doit mettre l’accent sur les neuf pays dans lesquels aucun service de vulgarisation n’est proposé (pays figurant sur le graphique), notamment la République centrafricaine où East-West Seed et Technisem sont présentes, et le Tchad où Corteva Agriscience est l’une des deux entreprises signalant des activités.
En Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, comme dans le reste du monde, les jeunes envisageant un avenir dans l’agriculture doivent surmonter de nombreux obstacles, notamment l’accès aux terres, aux infrastructures, aux marchés, aux informations et au crédit. Les entreprises semencières ont conscience de ces difficultés, et 14 d’entre elles (61 %), dont 12 sociétés régionales, indiquent avoir mis en place des programmes spécifiques pour encourager la nouvelle génération à se lancer dans l’agriculture.
AINOMA est leader dans ce domaine. Depuis 2015, l’entreprise met en œuvre un programme baptisé « Opération jardin scolaire » qui mène une action en faveur de l’agriculture dans 40 écoles. En créant des potagers dans les écoles, AINOMA souhaite contribuer à l’autonomie alimentaire du Niger, transmettre aux élèves des connaissances sur la nutrition et le développement durable grâce à des leçons pratiques et théoriques, et présenter l’agriculture comme une activité viable. Au Cameroun, Semagri organise des ateliers dans des centres de formation agricole afin de nouer des liens avec les jeunes exploitants.
Tropicasem participe à la création de potagers scolaires au Sénégal, et Value Seeds cible les jeunes paysans dans le cadre d’un programme de collaboration avec le Département britannique pour le développement international, dans l’État de Kaduna, au Nigéria. Da-Allgreen Seeds, Faso Kaba, Nankosem et Premier Seed déclarent soutenir les jeunes exploitants, mais ne fournissent aucune donnée pour appuyer leurs dires.
Pour Maslaha Seeds comme pour Syngenta, les technologies de l’information et de la communication (TIC) permettent de cibler les jeunes. Maslaha Seeds recrute et forme d’ailleurs de jeunes exploitants afin qu’ils transmettent les bonnes pratiques agricoles à leurs confrères. Dans le cadre du mouvement 4-H, Corteva Agriscience travaille avec la Fondation Bill & Melinda Gates en faveur de la mobilisation dans l’agriculture dans des pays comme le Cameroun, la Gambie, le Ghana, le Nigéria et le Sénégal.
NAFASO a récemment annoncé qu’elle prévoyait de construire un centre de formation agricole destiné aux jeunes du Burkina Faso et d’ailleurs. Les entreprises qui n’ont pas mis en place d’initiatives, de programmes ou de stratégies ciblant la nouvelle génération devraient envisager d’adopter ce type de démarches pour faire en sorte que les jeunes puissent vivre de l’agriculture sur de petites exploitations en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale.
Les logiciels et les dispositifs numériques étant de plus en plus abordables et accessibles, et les exploitations se révélant de mieux en mieux connectées, la technologie devient l’un des outils les plus efficaces pour développer les petites exploitations. Les entreprises régionales et multinationales évaluées dans l’Indice mettent donc en place des programmes destinés à réduire la fracture technologique. Dix entreprises (43 %) indiquent mettre en œuvre ce type d’initiatives.
L’utilisation des applications mobiles est représentative de cette évolution. En partenariat avec AfricaRice, la Fondation Syngenta a développé l’application RiceAdvice qui formule des recommandations personnalisées pour aider les agriculteurs des plaines à épandre plus efficacement les engrais minéraux. Entre 2015 et 2017, la Fondation a formé et mobilisé 230 prestataires de service RiceAdvice qui ont eux-mêmes guidé 19 000 petits exploitants au Nigéria, au Mali et au Sénégal pendant la période de végétation du riz. En outre, avec le Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA), la Fondation et AfricaRice ont lancé un projet ciblant 15 000 jeunes ruraux grâce aux TIC.
Il s’agit de les encourager à entreprendre et de renforcer les liens dans les secteurs agricoles au Mali et au Sénégal. ValueSeeds indique utiliser l’application RiceAdvice. L’entreprise emploie également 100 « agents de promotion des nouvelles technologies » se déplaçant à moto pour diffuser des informations et des conseils en matière de technologies auprès de ses clients de petites exploitations au Nigéria. L’application CropWiki d’East-West Seed est disponible dans tous les pays de l’Indice où l’entreprise est présente et fournit des informations sur les variétés proposées par celle-ci. Seed Co, entreprise implantée en Afrique de l’Est et en Afrique australe prévoyant d’élargir rapidement sa présence dans la région, développe également plusieurs applications intuitives pour fournir aux petits exploitants des informations agronomiques et des données concernant les variétés.
D’autres entreprises, y compris des acteurs régionaux aux ressources plus limitées, adoptent également des stratégies innovantes et remarquables faisant appel aux TIC. En Côte d’Ivoire, BILOHF envoie des SMS à ses clients de petites exploitations pour les informer des changements météorologiques, ce qui leur permet de s’organiser en conséquence. Au Mali, Faso Kaba utilise un système de bons d’achat électroniques mis à disposition par le Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest qui permet de réaliser des ventes par téléphone et facilite ainsi l’accès aux produits de l’entreprise. La SOPROSA, elle aussi présente au Mali, collabore avec l’Institut de formation professionnelle Malick Sidibé de Koutiala pour former les petits exploitants grâce à des modules interactifs. Maslaha Seeds, NAFASO et Tropicasem indiquent également utiliser les TIC, mais ne fournissent aucune donnée pour appuyer leurs dires.
Alors que les entreprises de l’Indice investissent clairement en faveur de la nouvelle génération d’agriculteurs, il n’en va pas de même pour les femmes. En Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, la transformation agricole est freinée par les problèmes rencontrés par les femmes qui constituent une part importante de la main-d’œuvre, mais n’ont pas accès aux principales ressources et ne maîtrisent pas l’utilisation de ces ressources. Seize entreprises (70 %) n’organisent aucune activité spécifiquement destinée aux femmes des petites exploitations, et dans les sept autres, cette question n’est pas prioritaire, les projets mis en place étant souvent isolés.
Value Seeds fournit un exemple de programme intéressant dans ce domaine. Dans l’État de Kaduna, l’entreprise collabore avec le DFID pour son programme Partnership to Engage, Reform and Learn (PERL). L’initiative cible 5 000 femmes (et jeunes) de l’État, et Value Seeds fournit des intrants et un soutien technique aux participantes afin de promouvoir la croissance de l’agriculture et de réduire la pauvreté.
D’autres entreprises se tournent vers les femmes dans le cadre de leur activité de production de semences. La SOPROSA emploie environ 850 productrices maliennes chaque année entre mai et octobre, et AINOMA indique former les productrices et développer leurs capacités, notamment sur les aspects techniques liés au traitement des semences. Faso Kaba déclare organiser des cours non mixtes sur l’amélioration des techniques de production, de conditionnement et de stockage des semences. À Sikasso, au Mali, Agriplus Mali est l’une des sept entreprises participant au projet EUCORD qui cible les agricultrices. Cependant, la contribution précise d’Agriplus Mali est difficile à déterminer.
Syngenta et la Fondation Syngenta se distinguent par leur approche globale du développement des capacités. La Fondation a recours aux nouvelles technologies pour aider les petits exploitants de la région, notamment au Mali et au Sénégal. En collaboration avec AfricaRice, l’entreprise a développé l’application RiceAdvice. En outre, elle entend encourager 15 000 jeunes à entreprendre grâce aux TIC. D’autres entreprises comme Value Seeds utilisent désormais elles aussi l’application.
En ce qui concerne l’étendue géographique de ses services de vulgarisation, Technisem affiche des performances clairement supérieures à celles des autres entreprises semencières. L’entreprise propose des formations dans 13 pays de l’Indice et est la seule à offrir ces services dans cinq pays (le Bénin, le Gabon, la République du Congo, la République démocratique du Congo et le Togo). De plus, Technisem emploie un grand nombre d’agents de vulgarisation, dont 32 au Burkina Faso et au Cameroun.
AINOMA est en pointe de l’action régionale destinée à faire de l’agriculture une activité viable pour les jeunes. L’entreprise met en œuvre l’Opération jardin scolaire dans 40 écoles du Niger. Il s’agit de créer des potagers dans les écoles afin de promouvoir l’agriculture et de transmettre aux enfants des connaissances sur la nutrition et le développement durable.